Le plaisir retrouvé de se lever chaque matin... Coach Emploi


Les propositions de stage...

J'ai du mal à accepter l'abondance des annonces déguisées en propositions de stage... J'ai du mal, parce que, comme vous, je sais que ces stages sont des emplois déguisés, des emplois de 6 mois proposés à nos jeunes, nos enfants, que l'on critique allègrement dans ce péjoratif "Y", cinglant et incompréhensible.

Enseignant à mes heures, je rencontre de jeunes diplômés devant rembourser leurs études avant même d'avoir commencé à travailler (par travail, j'entends emploi et non stage !), s'endettant lourdement, à hauteur d'un hypothétique loyer qu'ils seront incapables d'assumer seuls s'ils n'accèdent pas à leur but : un job, un vrai, reconnu et assumé comme tel par l'employeur. Les contraindre à commencer leur vie professionnelle en remboursant un crédit pendant 5 ans à coup d'indemnité de stage, de contrats free-lance, de précarité... est indigne de nous, employeurs, adultes, seniors, parents... Bien entendu, ce sont ces mêmes jeunes que l'on moque puisqu'ils partent souvent plus tard de chez leurs parents !

Ce qui me gêne dans tout cela, c'est l'attitude de nos entreprises, celles qui proposent systématiquement le même stage aux mêmes étudiants tous les 6 mois, cherchez bien autour de vous, vous en connaissez forcément une. Un stagiaire chasse l'autre, étant parfois chargé d'assurer le "tuilage" pour son remplaçant avant d'aller pointer chez Pôle Emploi. Ces entreprises ont un comportement scandaleux. Ces entreprises sont nombreuses, ces entreprises sont connues puisque nous y travaillons...

Ce qui me gêne ce sont les bols de fraises Tagada qui font "ambiance", hype, up... tous ces messages débiles destinés à déguiser l'absence de consistance, de moyens et d'envergure... Je lisais récemment une annonce proposant un stage en marketing reprenant à peu près ces mots : ".. ici, tu n'es pas obligé de porter un costume, on est plus dans l'esprit converse et jean…"- ça c'est l'idée que je me fais de mes stages en Espagne  -  mais prenez vous à ce point les jeunes pour des couillons ?

Ce qui me gêne c'est ce discours sur la jeunesse qui zappe, qui ne s'engage pas alors que rares sont les entreprises à RÉELLEMENT s'engager à leurs côtés. 
Récemment, je lançais un appel sur Twitter, demandant aux stagiaires combien d'heures ils travaillent chaque semaine et quelle indemnité ils reçoivent chaque mois. Sur une centaine de réponses obtenues, l'écrasante majorité travaille plus de 50 heures par semaine pour l'indemnité minimum prévue (les franciliens reçoivent une participation aux frais de transport...).

Ce qui me gêne, c'est de voir combien la valeur du travail s'évapore. Aujourd'hui, à 2 euros 15 cents de l'heure, un stagiaire se consacrant pleinement à sa mission se paye une visibilité, investit dans son avenir, il devient le réel seul entrepreneur, pariant, parfois à perte, sur l'"excellente visibilité" que lui offrira cette expérience pour l'un de ses prochains jobs... L'employeur se vante de son esprit d'entrepreneur, le stagiaire, lui, se comporte comme un entrepreneur.

Evidemment, cela ne concerne pas que nos diplômés, tous nos jeunes reçoivent le même type de "cadeau" de leurs ainés, un abandon pur et simple, un cynisme détestable recouvert de grandes valeurs auxquelles plus personne ne croit. Ce qui me gêne, c'est que nous ne sommes pas dignes de nos jeunes et qu'il est grand temps que cela change.




6 commentaires:

  1. Ah enfin un article qui fait plaisir à lire ! Merci Pierre pour cet article qui dénonce enfin les entreprises qui abusent des étudiants en leur offrant des stages à gogo sans vraies contre-parties !

    Je suis moi-même étudiante, j'ai de la chance, mon entreprise actuelle m'ait proposé un CDD à la fin de mon stage alors que la moitié de ma promo continue leur expérience professionnelle en tant que stagiaire.

    Aujourd'hui, l'état français tente de réglementer les stages pour que les étudiants soient gagnants, mais je vous assure que les entreprises trouveront toujours une parade à cela !

    Mais je pense qu'il ne faut pas accuser que les entreprises. Les étudiants le veulent aussi. Certains manquent d'ambitions et acceptent des stages à la place de CDI qui leur sont offerts...

    Ou prennent ce qui est à leur portée : le stage.

    Les entreprises contribuent aussi à ce manque d'ambition en rembarrant les étudiants avec des "Vous n'avez pas assez d'expériences. Les stages ne comptent pas.", ça veut dire quoi ça ? Que l'on fait des stages pour rien ?

    Il faut que les RH se réveillent un peu !

    Merci Pierre pour ton soutien envers les étudiants :)

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  2. Anonyme11:20

    Excellent billet Pierre. 2 cousins, diplômés, en ont eu assez de faire des stages ou CDD. Ils partent prochainement à l'étranger.

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  3. tu as completement raison Pierre, le stage est devenu un business pour certains clients et certains recruteurs (j'ai vu des cabinets afficher sans vergogne ce type de recrutement et prendre l'equivalent des 6 mois de gratification en rem ... on se marche sur la tete .

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  4. Voilà, au moins, ça, c'est dit ! Merci Pierre :)

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  5. Voilà, au moins, ça, c'est dit ! Merci Pierre de dénoncer des abus, cautionnés dans une espèce d'ambiance de "responsable" mais pas "coupable" et tout continue dans le meilleur des mondes, alors, qu'en finalité, personne n'y trouve son compte ! Merci pour ce coup de gueule qui a le mérite de remettre les choses à leur place. Bonne fin d'année à tous ! :) Ghislaine

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  6. Bonjour,

    je vous soutiens dans votre démarche, et vous remercie également de voir le stage sous un autre angle. Je suis moi-même étudiante en école de commerce (année de césure). Il faut savoir que c'est avant tout l'appréhension de ne pas être viable sur le marché du travail au sortir de la vie estudiantine qui fait que les stagiaires sont prêts à fermer les yeux sur la qualité des offres.

    J'ai écumé bon nombre d'offres de stage, que ce soit en France comme à l'étranger, et j'ai pu remarquer que la majorité est en fait un véritable travail déguisé ; la liste des compétences à avoir pour prétendre à occuper de tels postes ne cesse de s'allonger. Les étudiants doivent faire leur preuves, payer au sens propre comme figuré (et on ne parle même pas des agences intermédiaires qui tirent profit de cette situation de manière purement scandaleuse.. J'ai été en contact avec l'une d'entre elles récemment, qui assurait ne pas proposer de stages rémunérés à Londres, que ça n'existait presque pas de toute façon, qu'en revanche une promesses d'entretien se monnayait contre la modique somme de 500€..) Allons, des stagiaires rémunérés en Grande-Bretagne j'en ai croisés. Mensonges et escroqueries. Et les écoles de commerce ne nous protègent pas, mais nous offrent plutôt en chair à canon à leurs partenaires, en effet. Les entreprises recherchent aussi des "stagiaires ayant de l'expérience dans [tel domaine]", mais voyons, cette "période d'apprentissage et de formation" ne doit-elle pas venir en complément des notions théoriques vues en cours ? Comment peut-on avoir de l'expérience alors que l'on sort des bancs de l'école, c'est tout bonnement paradoxal. Ca témoigne avant tout d'une défaillance dans le système dont nous, jeunes, faisons les frais. Les écoles de commerce devraient également davantage s'investir et protéger les étudiants. Je me suis retrouvée l'an dernier à être exploitée (et je n'étais pas la seule, nous étions deux stagiaires de mon école) par une entreprise peu scrupuleuse qui garantissait un stage en marketing/commercial à Toulouse dans une résidence étudiante. En fin de comptes, je me suis retrouvée à faire femme de ménage dans les appartements, à enchaîner visite après visite, à devoir mentir aux futurs locataires pour leur extorquer toujours plus d'argent.. Je me suis sentie rabaissée, à devoir nettoyer des toilettes d'appartement avant que les locataires ne s'installent, etc.. et quand je me suis plainte à l'école, au lieu de me protéger, elle m'a dit "de ne pas hésiter à en parler à mon maître de stage" qui était totalement réfractaire au dialogue (et il y avait de quoi). J'ai pu mettre fin à mon contrat un mois avant.
    Ce genre d'abus, je ne suis pas la seule à en être victime, mais il faut que cela cesse ! Si vous avez besoin d'un quelconque support dans votre démarche, n'hésitez pas à me contacter (par message ici, en réponse, je repasserai).

    Merci encore !

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